Dans cette interview, Philippe Laulanie, directeur général et administrateur de CB, revient sur l’évolution des moyens de paiement, de la carte bancaire aux solutions comme le Click to Pay. Il aborde aussi les enjeux de souveraineté, la gestion des coûts pour les commerçants et les défis de la sécurité dans un environnement numérique en constante mutation.
Face à la multiplication des moyens de paiement (mobile, instantané, fractionné), comment voyez-vous évoluer la place de la carte bancaire ? Ces nouveaux usages sont-ils complémentaires ou concurrents ?
Mon premier credo, c’est la complémentarité. La plupart des moyens de paiement évoqués dans votre question reposent sur la carte bancaire. Ils enrichissent l’expérience des consommateurs en offrant des services complémentaires, sans pour autant remplacer la carte.
Je suis convaincu à ce titre que la carte continuera d’occuper une place centrale et restera le moyen de paiement préféré des Français, au moins jusqu’en 2030. Elle combine simplicité, fiabilité et universalité, des qualités essentielles qui lui permettent de s’adapter aux évolutions des usages.
Un exemple concret est le paiement mobile : après le Crédit Agricole, la Société Générale et La Banque Postale, toutes les grandes banques françaises auront intégré CB à leur offre Apple Pay d’ici la fin de l’année.
Selon vous, va-t-on vers une société véritablement « cashless » en France ? Dans quel horizon temporel ?
Je ne crois pas à une société entièrement “cashless” en France, même à moyen terme. Bien que l’usage des espèces diminue régulièrement, elles restent indispensables pour une partie de la population et pour certains usages.
L’avenir des paiements repose sur le choix. Les consommateurs doivent pouvoir payer en espèces, par carte, ou via tout autre moyen de paiement. C’est cette diversité, le “multi-paiement”, qui garantit une expérience inclusive et adaptée à tous les besoins et à tous les consommateurs.
Le déploiement de Click to Pay avance dans l’e-commerce français. Où en est le déploiement aujourd’hui ? Quels sont les premiers retours des consommateurs et des commerçants ?
Click to Pay est en phase de développement pour le marché français. Bien que les premières annonces marketing aient été faites, les banques françaises ne proposent pas encore ce service à leurs porteurs. Cependant, CB est pleinement engagé, en collaboration avec STET, dans la mise en place d’une solution robuste et adaptée aux besoins spécifiques des consommateurs et des commerçants français. L’objectif est de proposer une expérience de paiement en ligne fluide, simple et sécurisée.
Comme pour toute innovation dans le domaine des paiements, son succès dépendra largement de son adoption par les e-commerçants et les utilisateurs finaux. Il est important de rappeler que les innovations majeures prennent souvent du temps pour s’ancrer durablement dans les habitudes. Par exemple, le sans contact, lancé en 2012, et Apple Pay, introduit en 2016, ont mis plusieurs années avant de devenir des usages courants. Le temps jouera également un rôle clé pour Click to Pay.
L’inflation relance les débats sur les coûts des transactions, particulièrement pour les TPE/PME. Comment analysez-vous l’évolution de ces coûts pour les commerçants ? Comment optimiser ces coûts tout en maintenant la qualité du service ?
L’inflation met effectivement les coûts des transactions sous les projecteurs, en particulier pour les TPE et PME, qui sont souvent les plus sensibles à ces enjeux. Chez CB, nous avons développé des algorithmes avancés et cultivé une proximité forte avec l’ensemble de l’écosystème – banques, commerçants, industriels – pour optimiser en continu les coûts tout en garantissant un service fiable et de haute qualité.
Mais ce sont surtout les commerçants qui témoignent le mieux de cette efficacité et déclarent qu’avec CB, les transactions sont en moyenne jusqu’à 10 fois moins coûteuses que celles des principaux concurrents. En prime, notre réseau affiche un niveau de sécurité exceptionnel, avec des taux de fraude parmi les plus bas du marché. Cette combinaison d’optimisation économique et de fiabilité fait toute la différence, en particulier dans un contexte économique tendu.
Dans un contexte géopolitique tendu, comment évaluez-vous l’importance de la souveraineté des moyens de paiement ? Quels sont les risques d’une trop grande dépendance aux systèmes internationaux ?
Dans un contexte géopolitique instable, la souveraineté des moyens de paiement est une question stratégique pour l’autonomie économique et la résilience des pays. Un système de paiement souverain comme CB offre une indépendance cruciale face aux aléas internationaux, qu’ils soient liés à des tensions politiques, des sanctions économiques ou de cyber-attaques.
Avec CB et STET, la France dispose d’une plateforme de paiement domestique résiliente qui respecte les spécificités françaises et européennes, protège les données sensibles et garantit un haut niveau de sécurité, contribuant ainsi à la confiance des commerçants, des consommateurs, et à la souveraineté économique de la France.
Comment l’authentification forte a-t-elle impacté les taux de fraude en ligne ? Face à l’émergence de nouvelles menaces, comment évoluent les systèmes de détection ?
Depuis l’entrée en vigueur de l’authentification forte, le taux de fraude dans le e-commerce a été divisé par deux, démontrant son efficacité pour sécuriser les transactions en ligne. Les internautes bénéficient ainsi d’un niveau de protection renforcé, favorisant la confiance dans les paiements numériques.
Cependant, les fraudeurs n’ont pas disparu ; ils ont juste évolué. Avec l’émergence de nouvelles menaces, il est impératif de rester vigilant. Pour répondre, CB et STET investissent massivement dans des solutions basées sur l’intelligence artificielle. Les technologies mobilisées permettent de détecter les comportements suspects en temps réel et d’anticiper les nouvelles tendances frauduleuses, garantissant une sécurité optimale sans compromettre l’expérience utilisateur.
Philippe Laulanie est membre du Jury du Grand Prix des Favor’i E-commerce 2025. Le Prix du Jury est une distinction qui se divise en 3 catégories : le Prix RSE, le Prix de l’Innovation et le Prix Espoir. Chaque année, cette récompense est décernée par le Grand Jury qui rassemble des professionnels reconnus du secteur, experts et passionnés de e-commerce. Rendez-vous le 6 mars 2025, en direct sur BFM Business, pour la cérémonie de cette 18ème édition.